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Avec le récent succès de la série The Witcher, on pourrait se demander pourquoi ne voit-on pas plus souvent des héros iconiques du jeu vidéo ailleurs que sur les médias vidéoludiques.
- The Witcher rencontre un grand succès
- Une popularité d’origine bel et bien vidéoludique
- Les œuvres transmédia : un rêve de créateur
- Le jeu vidéo joue les difficiles
- Pourquoi le jeu vidéo de transpose-t-il aussi mal ?
- Des tentatives timides… et animées
- Pokémon : le jeu conçu pour être un phénomène de société
- Une persistance qui semble payer
The Witcher rencontre un grand succès
Sortie le 20 décembre 2020, juste à temps, pour Noël, la série Netflix « The Witcher » a su faire forte impression.
La première saison de 8 épisodes a réussi au moment de sa sortie à attirer les yeux de pas moins de 76 millions de spectateurs, la plaçant à la troisième place des séries à la demande les plus vues, juste derrière Stranger Things et The Mandalorian.
La série The Witcher est une adaptation de l’œuvre de l’auteur polonais Andrzej Sapkowski : « Wiedźmin ». Elle raconte les (més)aventures du witcher Geralt de Riv (joué par Henry Cavill), un mutant spécialisé dans l’extermination de monstres, malédictions et créatures surnaturelles en tous genres.
Paria dans ce moyen-âge aux traits de dark fantasy, le loup blanc ère de contrat en contrat tandis que s’actionne autour de lui les rouages d’une destinée bien plus large. Il lui faudra apprendre par le biais de ses rencontres que la vie n’a pas forcément besoin de n’être qu’un constant bain de sang de monstres.
Une popularité d’origine bel et bien vidéoludique
Bien que la série de Netflix ne s’intéresse qu’à l’adaptation des livres, il serait malhonnête de dire que ce sont ces derniers qui ont véritablement attiré l’attention du grand public sur cette saga.
Si Wiedźmin a effectivement connu un franc succès en Europe de l’est, ce n’est véritablement que lorsque CD Projekt Red a cherché à en faire une adaptation en jeu vidéo que le monde décrit par Sapkowski a réellement commencé à prendre vie aux yeux du monde entier.Très respectueux de l’œuvre originale, CD Projekt Red a souhaité apporter une suite à cette série de livre aujourd’hui terminée en proposant une suite sous de jeux Action/Adventure, se déroulant des années après les derniers événements apparus dans les livres.
Malgré des départs quelque peu amateurs, chaque opus de cette franchise a effectué de surprenants bonds en qualité, démontrant les talents de création de ce studio lui aussi polonais. The Witcher 3, clou de la saga sorti en 2015, est aujourd’hui vu comme un des jeux les mieux noté de l’histoire vidéoludique, ayant reçu le prix de « meilleur jeu de l’année » aux Game Awards de 2015.
Les œuvres transmédia : un rêve de créateur
De manière plus ou moins accidentelle, The Witcher est ainsi devenu une véritable série transmédia, c’est-à-dire, une seule franchise s’étalant sur différents médias créatifs. Ici, elle s’étend sur des livres, une série à la demande et des jeux vidéo.
Bien qu’atteindre ce statut ne soit pas nécessairement facile, il s’agit d’une véritable aubaine pour les créateurs y participant, qui y gagnent sur tous les tableaux. Chaque œuvre devient elle-même une extension d’un grand ensemble, permettant d’étendre le monde et de s’intéresser à des aspects plus spécifiques le concernant.
D’un point de vue plus matérialiste, chaque œuvre agit surtout comme une publicité pour les autres médias associés, permettant d’attirer des aficionados simultanément depuis plusieurs types de médias. Il s’agit d’une pratique extrêmement rentable si elle réussit. Sans surprise pour The Witcher, le succès de la série Netflix coïncide des ventes record du livre et du jeu sur Steam, bien que ce dernier soit sorti il y a 5 ans de cela aujourd’hui.
Bien entendu, cette stratégie n’est pas réellement « nouvelle ». Une énorme partie des films et séries que l’on retrouve sur nos écrans sont par exemple des adaptations plus ou moins directes de livres à succès.
Disney a lui seul a compris depuis plus d’un siècle la puissance de la multiplication des supports, adaptant la plupart de ses productions en séries, dessins animés, jouets et attractions.
Il peut être tentant, pourvu qu’on en ait les moyens et l’ambition, de vouloir exporter sa franchise vidéoludique vers d’autres horizons. Toutefois, cette tâche s’avère souvent plus ardue qu’il n’y parait.
Le jeu vidéo joue les difficiles
On remarque cependant que lorsqu’il s’agit d’inclure le jeu vidéo dans ces processus multimédias, ces transitions ne se font pas sans heurts.
En effet, rares ont été les jeux adaptés de film ou roman ayant reçu une chaude réception critique. Traditionnellement, la plupart des joueurs les considèrent même avec une certaine méfiance.
On se rendra d’ailleurs compte que ceux qui y parviennent, comme The Witcher, Kingdom Hearts ou Star Wars s’éloignent assez drastiquement du matériau de base, privilégiant des aventures réalisées sur mesure.
L’inverse est malheureusement tout aussi maladroit, le jeu vidéo possède notamment un passé caillouteux lors de ses rares aventures au cinéma ou en séries. Les joueurs et cinéastes les plus avides se rappelleront de films tels que Super Mario Bros, Mortal Kombat, Alone in the Dark ou encore Street Fighter, tous considérés comme particulièrement médiocre, ou, plus amicalement, comme des navets.
Malgré un certain enthousiasme initial, le jeu vidéo étant un média encore nouveau et inexploré, réalisateurs et spectateurs se sont rapidement détournés de l’idée de ces adaptations et peu de films tirés de jeux vidéo ont vu le jour après les années 90.
On a bien entendu pu voir d’autres tentatives effectuées plus récemment, telles que Prince of Persia: The Sands of Time, Warcraft ou Détective Pikachu. Bien que la réception populaire de ces films ait été moins froide, il est toutefois rare de voir ces adaptations dépasser la note de « médiocre ».
Pourquoi le jeu vidéo de transpose-t-il aussi mal ?
Il y a de nombreux facteurs qui entrent en jeu dans ce phénomène, tels qu’un budget souvent très limité donné à des studios sous-traitant. Cependant, le plus important semble sans doute être la notion d’interactivité.
Le jeu vidéo est à ce jour le seul média culturel de masse à être véritablement interactif. Les jeux ne prennent pas seulement en compte la présence du joueur : ils ne sont rendus possibles que par ses actions.
En comparaison, tout autre type d’œuvre est fixe, statique. L’histoire d’un roman et d’un livre ne se modifiera jamais ; la seule action que peut prendre celui qui les consume est d’arrêter de s’y intéresser.
De par leur nature, les jeux sont conçus pour être non-linéaires, proposant des choix dans la manière d’approcher chaque situation et introduisant même la notion d’échec (game over). En plus de cela, de plus en plus de jeux aujourd’hui permettent aux joueurs de choisir la destinée de son personnage, multipliant les choix narratifs et les fins en fonction de leurs préférences.Dans le cas de certains titres, la présence d’une histoire ne joue qu’un rôle symbolique, un prétexte qui sert de support pour une expérience purement basée sur le gameplay. Prenant place dans de nombreux univers sans aucun réel lien logique, la série des Mario a volontairement délaissé toute volonté scénaristique, ce depuis ses tout débuts.
Tuyaux, champignons, goombas et plateformes volantes n’ont aucun sens dans un monde avec une logique scénaristique, mais ont un design presque instinctif dans un jeu.
En d’autres termes, la notion de gameplay ne peut pas réellement être retranscrite en dehors du cadre d’un jeu. La logique vidéoludique n’a pas réellement de sens dans des adaptations plus linéaires, ce qui explique les étranges choix des cinéastes, forcés de créer de toutes nouvelles histoires tout en intégrant des références à un gameplay qu’ils ne peuvent pas reproduire.
Des tentatives timides… et animées
Difficile ne veut pas dire impossible. Au milieu de ce tumulte, plusieurs jeux tentent de créer leurs franchises et de véritablement s’étendre sur plusieurs plateformes. On pensera par exemple à Payday, accompagnant son titre d’une web série semi-professionnelle.
Plus souvent cependant, c’est vers le dessin animé que se tournent ces adaptations. Certains éditeurs nippons ont trouvé depuis plusieurs années une petite niche en adaptant leurs licences phares sous la forme d’anime. On retrouve récemment l’adaptation de Persona 5 par le studio A-1 Pictures ou même une ré-imagination de l’histoire de Castlevania, produite également par Netflix.
La France n’est toutefois pas en reste. Le Studio Ankama est particulièrement connu pour avoir tenté d’exporter le monde d’Amakna dans le monde du manga. Le dessin anime Wakfu, directement basé sur leur MMO du même nom est même aujourd’hui un des dessin animés français les plus populaires et reconnus à l’internationalPlus que les « live performance », il semblerait que l’animation soit le principal espoir des œuvres souhaitant étendre leurs univers sur différents supports, probablement de par sa facilité à s’éloigner du réel. Plus rarement, on retrouve également quelques romans à succès empruntant et développant les histoires sous-jacentes de certains univers gigantesques, tels que Warcraft ou The Elder Scrolls.
On remarque également que ces adaptations ne se concentrent presque jamais sur l’histoire principale décrite dans l’oeuvre originale ; elles se contentent d’en reprendre l’univers, permettant ainsi aux codes de ne jamais réellement s’entrechoquer.
Pokémon : le jeu conçu pour être un phénomène de société
Si l’on recherche un jeu ayant véritablement pulvérisé les barrières séparant ces médias, comment ne pas citer le cas de Pokémon.Pokémon est, à la base, un RPG assez simple conçu par l’éditeur Nintendo. La saga est suffisamment connue pour ne pas avoir à s’étendre sur son principe : il faut suffisamment tous les attraper.
Cependant, réduire cette licence à ce simple énoncé serait ignorer l’ampleur colossale du juggernaut marketing au cœur de la stratégie du géant nippon. Une opération de communication dont l’ampleur n’a que rarement été égalée.
Dès sa conception, Pokémon n’a en effet pas été pensé comme un simple jeu, mais bel et bien un phénomène de société. En parallèle au jeu sur Gameboy, on pensera notamment à la sortie simultanée d’un anime, de plusieurs mangas, films, mais aussi peluches jouets et gadgets ainsi que, du moins au japon, de magasins entièrement spécialisés dans la vente de produits Pokémon.
Une persistance qui semble payer
Bien que la série The Witcher fasse figure d’exception, elle reste un exemple encourageant en ce qui concerne a place du jeu vidéo dans le grand ensemble culturel des oeuvres transmedia. Il s’agit bel et bien de la preuve que le système fonctionne, redonnant un souffle de vie et une visibilité à ce jeu s’étant naturellement effacé après quelques années.
Plus que jamais, le jeu vidéo est à la mode cependant. Sans forcément être tiré de références précises, la montée du genre « Isekai » dans les animes, très clairement inspiré de mondes vidéoludiques, en est un parfait exemple.
Avec cette influence de plus en plus présente, il n’est pas exclu de voir de plus en plus de jeux lourdement scénarisés tenter de s’exporter vers de nouveaux médias ; cette fois on l’espère, avec succès.Il est intéressant de noter que ce privilège n’est pas réservé qu’aux studios AAA. Le studio indépendant Lab Zero Games, à l’occasion de la création de leurs jeux Skull Girls et Indivisible ont fait appel à de très nombreuses contributions d’artistes professionnels provenant de communautés d’internautes. Afin de réaliser plusieurs animations et la bande annonce de Indivisible, ces développeurs ont même fait équipe avec le Studio Trigger, spécialisé dans la création d’animé.
L’intégration du jeu vidéo au reste des oeuvres culturelles reste complexe, mais plus proche que jamais. Elle s’effectuera simplement sous un angle différent de ce à quoi on aurait pu imaginer.
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